dimanche 29 septembre 2013

Et si la vie intelligente et consciente n’était qu’une erreur de la Nature ?

Comme la majorité des humains, face à la remarquable capacité de notre cerveau à résoudre des problèmes et  à nous faire prendre conscience de notre existence, j’arrivais facilement à la conclusion que notre émergence comme être pensant constitue une sorte d’aboutissement ultime du processus évolutif de la nature nous plaçant au sommet du règne animal.  Comme je n’adhère plus à aucune religion, j’ai bien sûr écarté l’hypothèse d’un Dieu créateur qui aurait fait l’homme à son image,  comme l’ont affirmé quelques illuminés (lire prophètes !)  qui avaient la prétention d’être branchés directement sur le téléphone céleste ! Mais dans un cas comme dans l’autre est-ce que l’on peut vraiment affirmer que la vie intelligente et consciente est un si « bon coup » pour l’ensemble de la Nature ? La capacité de l’espèce humaine à s’adapter à presque tous les environnements est sans doute extraordinaire pour sa propre survie, mais en quoi est-elle bénéfique à la biodiversité et à l’équilibre de la planète? Force est de reconnaître que l’avidité de l’espèce humaine est  à l’origine de l’une des plus grandes extinctions d’espèces animales et végétales que la planète a connues ! On peut donc s’interroger sur la valeur réelle de sa contribution.

En terme proprement scientifique on ne peut affirmer que l’espèce humaine est une « erreur » de la nature. La notion d’erreur est humaine,  la science se contente plutôt d’observer et de faire des constats. Dans le passé lointain de la Terre, il y a eu d’autres extinctions massives d’espèces attribuables à des météorites ou des éruptions titanesques de volcans, des phénomènes tout aussi naturels que l’on ne peut pas qualifier « d’erreurs ». La différence aujourd’hui c’est que l’extinction massive est attribuable à une espèce pensante et supposément « consciente » de l’impact de ses actions. En fait, les humains sont effectivement conscients de leurs actions, mais à une échelle qui est loin d’englober la planète et qui est surtout orienté en fonction d’une satisfaction immédiate sans égard aux conséquences sur l’environnement.  Malgré son organisation collective, ses lois et ses règlements, l’espèce humaine n’arrive pourtant pas à agir de manière à préserver les véritables ressources naturelles qui sont essentielles au soutien de la vie (ce qui exclut le pétrole !) incluant la tienne ! Comme l’humain est le roi de la triche et de l’opportunisme, il arrive constamment à enfreindre ses propres lois et traités. Ainsi, malgré le protocole de Kyoto (signé en 1997), malgré tous les beaux discours sur la nécessité de réduire les gaz à effet de serre, la quantité de gaz émis augmente chaque année. Entre 1990 et 2006, la production de CO2 a progressé de 33,4% à l’échelle mondiale. À part quelques rares pays, dont l’Allemagne, qui ont réussi à abaisser (-13,4%) leur émission de GES pendant la même période, d’autres pays comme la Chine (+151,7%), le Canada (+28%) et les États-Unis (+16%) ont haussé leurs émissions de GES de manière significative. Il en va de même pour les quotas de pêches, d’exploitation des forêts ou de chasse des espèces menacées. En fait, la tricherie est présente un peu partout où les humains agissent, au Québec nous n’avons qu’à penser à certains  bureaux d’ingénieurs et à certains élus municipaux qui ont eu recours à la collusion et à la corruption pour contourner les règles d’attribution des contrats par les villes !

Plus jeune, j’imaginais que l’être humain avait été créé par l’Univers (dans l’hypothèse où l’Univers est une entité quelconque  consciente de son existence! ...on n’est pas loin de Dieu  bref !) pour se doter d’un observateur conscient, car je me disais à quoi bon mettre au monde des galaxies, des étoiles,  des systèmes planétaires et une nature vivante,  si en fin de compte il n’y a aucun observateur conscient pour apprécier le spectacle ?  Mais la science nous enseigne que l’apparition de l’espèce humaine est le résultat d’une longue chaîne évolutive qui a probablement démarré par une algue bleue au bord de l’océan. Nous devons donc notre émergence du néant à un cocktail chimique à base de carbone et brassé par différentes forces et par beaucoup de hasards sur quelques millions d’années. Bref l’espèce humaine n’est pas le résultat d’un « dessein intelligent » comme certains le prétendent (les créationnistes  entre autres) mais bien le fruit de la chimie organique et de la sélection naturelle des espèces  comme l’a démontré Charles Darwin.  Notre conscience d’exister et de devenir un observateur de l’Univers est apparue progressivement par le développement de notre cerveau. Mais cette conscience d’exister est en quelque sorte un « effet secondaire » de l’intelligence, car nos capacités mentales étaient d’abord et avant tout requises pour assurer notre survie et notre reproduction,  à l’image de nos cousins les autres primates.  On peut observer la progression de la conscience dans le développement d’un nourrisson qui commence par découvrir que la main qui s’agite devant ses yeux lui appartient et qu’il peut la contrôler, par la suite sa motricité se développera et il commencera par explorer son corps, son berceau, sa chambre et le reste de la maison en se traînant puis en titubant et très graduellement, dans la petite enfance,  il deviendra un observateur du monde qui l’entoure en prenant d’abord conscience de sa propre existence,  en se reconnaissant dans un miroir par exemple(entre 1 ½ an et 2 ans).

De la naissance jusqu'à la fin de nos jours  notre conscience d'exister évolue

 Bien sûr,  le développement de la conscience ne s’arrête pas à la petite enfance,  en fait chaque être humain raffine tout au long de sa vie sa perception du monde grâce aux connaissances qu’il accumule et aux relations qu’il développe avec ses semblables et l’ensemble des êtres vivants de la planète. Nous sommes donc assez différents sur le plan de la conscience,  car notre manière d’appréhender le monde dépend énormément de notre degré de curiosité, de notre éducation et de l’influence de notre milieu.  Bref l’univers de certains peut se terminer au bout d’une ruelle alors que pour d’autres il s’étend à l’infinie,  au-delà des plus lointaines galaxies ! Mais dans un cas comme dans l’autre c’est souvent le cerveau reptilien qui prend le dessus de telle sorte que notre conscience du monde extérieur se trouve inféodé à nos besoins primaires et à des décharges d’hormones ! De plus, chaque individu doit composer avec un bagage génétique qui prédétermine plusieurs variables qui auront une profonde influence sur son comportement et sa perception du monde extérieur. Si la conscience d’exister peut apparaître aux yeux de certains comme un « miracle » pour d’autres elle sera ressentie comme une véritable calamité au point de vouloir s’en soustraire par tous les moyens,  incluant le suicide.  La conscience individuelle est parfois altérée par la maladie mentale ou physique et un rien peut nous faire basculer de la « normalité » à un état pathologique et souvent de manière très insidieuse. Ainsi, des hommes d’État ont gouverné des pays pendant des années avec des problèmes psychologiques graves qui ont affecté leur perception et leur jugement au point de provoquer des conflits et des crises humanitaires majeures...les exemples ne manquent pas, même au XXIe siècle!

Dans un monde idéal, nous devrions tous développer un genre de « conscience universelle » qui nous permettrait de mesurer constamment  la portée réelle de nos gestes. Mais dans la réalité cet objectif est complètement utopique, car il est impossible d’harmoniser les consciences individuelles qui sont autant de mondes parallèles. La conscience d’exister amène certains à créer de la beauté par la peinture ou la littérature et d’autres à mettre le feu et à tuer leur semblable au nom d’une croyance ou d’une idéologie.  Pourtant la vérité n’appartient à personne, car « la vérité » est une autre invention humaine dont le sens varie en fonction du point de vue comme la notion de bien et de mal.

Poser la question sur le sens de la conscience nous amène invariablement à poser la question sur le sens de l’Univers et de son existence.  La science demeure impuissante à répondre à cette grande question, elle peut expliquer en partie le fonctionnement de l’Univers et de son origine jusqu’au temps de Plank,  soit une fraction de seconde après le Bing Bang (10-43 sec.), mais elle ne peut voir au-delà du  Bing Bang et encore moins donner un sens à tout ce déferlement d’énergie émergent d’une singularité ou toute la matière de l’Univers était contenue dans une minuscule tête d’épingle.  Une réalité physique difficile à cerner par notre « petite conscience humaine » qui n’apprécie bien les choses uniquement lorsqu’elles sont à sa portée et qu’elles ont des dimensions finies.  On peut alors comprendre nos ancêtres qui ont littéralement « inventé » un sens spirituel à l’Univers afin de calmer leurs angoisses face à la mort et à l’absence de réponse sur le sens profond de leur existence et celui de l’Univers. Les religions sont alors  nées et comme toujours les tricheurs les ont utilisés pour mieux dominer leurs semblables ou justifier leurs pires actions. 

Si la conscience d’exister est une variable positive pour l’Univers, la race humaine aura un avenir dans le cas contraire c’est la Terre elle-même qui effacera cette « erreur », non pas par vengeance, car elle n’a pas de sentiment,  mais uniquement par principe d’équilibre. En modifiant le climat par les GES, en vidant les océans par la surpêche ou en rasant les forêts pour accroître les monocultures, l’espèce humaine démontre par le fait même que sa conscience d’exister n’a vraiment rien d’universel et qu’elle est plutôt toxique pour l’environnement, car elle en sabote constamment l’équilibre. Ce que j’observe autour de moi m’amène à penser que l’espèce humaine pourrait très bien disparaître comme les dinosaures, laissant derrière elle des ossements,  de vieux oléoducs rouillés et des tonnes de matière plastique dispersés dans des océans sans vie. Le dernier rapport du GIEC ne fait d’ailleurs que confirmer que l’espèce humaine se dirige tout droit dans le mur si elle ne fait pas « consciemment » marche arrière rapidement... Mais comment persuader une civilisation de tricheurs de suivre ce conseil ?


Finalement, je crois bien que mon  intuition de jeunesse était la bonne :  la conscience d’exister n’aura un sens uniquement lorsque nous deviendrons des observateurs sensibles et admiratifs de la nature et que cet état nous amènera à vivre en harmonie avec notre environnement... Mais aujourd’hui je doute que nous puissions y parvenir, la conscience intelligente n’aura donc été qu’un autre essai raté pour l’Univers.

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