|
Les vieux négatifs ont remplacé les cigarettes |
Dans les fameuses boîtes de cigarettes en
métal « Sportsman » et « Sweet Caporal » où mon père
conservait ses négatifs, j’ai également retrouvé des clichés qui appartenaient
à ma mère et qui ont été prises à différentes époques avant le mariage de mes
parents. Parmi les photos les plus anciennes, certaines pourraient avoir été
prises avant la naissance de ma mère au début des années 20, mais le peu de
repères chronologiques dans les images ou sur la pellicule elle-même ne permet
pas de dater ces photos avec certitude. Mais peu importe, j’ai retrouvé avec
bonheur des photographies inédites de mon grand-père et de ma grand-mère maternelle
et bien sûr de ma mère et de mes tantes à l’époque de leur enfance et de leur
adolescence.
|
Philippe Grenier au deuxième rang à droite, à gauche son meilleur ami Émile Laplante, journée au camp de pêche avec Monsieur le curé. |
|
Monsieur le Maire dans son champ ! |
Mon grand-père Philippe Grenier était pour moi
un personnage plus grand que nature. Le passage du temps n’a fait que magnifier
et embellir mon souvenir de cet
homme que j’ai peu connu. En effet,
je n’avais pas 10 ans lorsqu’il décéda en 1962 à l’âge de 82 ans. Il faut l’avouer, j’avais également peur de cet homme au visage sévère, à la
tignasse blanche immaculée et à la forte corpulence. Jusqu’à 7 ans, je l’ai côtoyé de très près puisque nous
habitions dans le logement qu’il avait aménagé pour mes parents à l’étage de sa
belle maison ancestrale du Chemin Royal à Villeneuve. Villeneuve qui fut
d’abord Beauport Est (avant 1951), puis avec les fusions municipales devint Beauport (en 1976) et
maintenant Québec (en 2002). Mon grand-père
fut d’ailleurs le maire de Beauport Est en 1931et 1932 et de 1939 à 1944. C’était un touche-à-tout, mais il était d’abord menuisier de
métier. Derrière la maison familiale, il y avait un hangar au parement de tôles
grises qui ne payait pas de mine, mais qui exerçait une véritable fascination
pour le jeune enfant que j’étais. C’était le repère de mon grand-père ! Au rez-de-chaussée du bâtiment on
retrouvait un véritable bric-à-brac d’outils de jardinage, de vieux meubles et
d’objets de toutes sortes, près de l’entrée il y avait un escalier abrupt qui aboutissait sur une trappe que l’on
devait pousser pour atteindre le repère du grand-père à l’étage. C’est en effet
au premier que se trouvait son atelier où trônait au centre l’impressionnant « banc
de scie » et son énorme moteur électrique qui une fois lancé faisait
trembler les planches du vieil édifice de même que mes petites jambes d’enfant.
Je me souviens que l’un des murs
de son atelier était couvert de rabots, de bouvets, de vastringues et bien sûr
de varlopes ! Je me souviens de l’avoir aperçu par l’une des fenêtres à carreau en train d’aiguiser
ses égoïnes avec ses petites limes triangulaires, un travail de patience que la
plupart des menuisiers d’aujourd’hui ont délaissé au profit des scies circulaires portatives aux lames en carbure quasi inusables... on n’arrête pas le progrès ! Malheureusement
mon grand-père est décédé avant de me transmettre sa connaissance du travail du
bois, mais sans le vouloir il m’a transmis sa propre passion, simplement en vivant à mes côtés.
|
Le patriarche dans sa maison |
Avalé par les grandes villes, il reste peu de choses de Villeneuve,
ce « petit bourg charmant »
qui a été labouré au nom du « progrès ». Dès les années 50 les ciments du
Saint-Laurent ont débuté l’exploitation d’une gigantesque carrière de calcaire
au bout des terres de mon grand-père afin d’alimenter la tristement célèbre
cimenterie de Montmorency qui a
empoisonné l’existence de ses citoyens pendant quelques décennies. Ensuite, à la fin des années 60 l’autoroute 40 a
littéralement divisé Villeneuve en deux
en plus de faire disparaître de belles maisons ancestrales sur le Chemin Royal. Finalement la baisse de la ferveur religieuse a eu également raison l’église de
Villeneuve qui a disparu sous le pic des démolisseurs en 2012, laissant place à
un énorme complexe immobilier. Ce n’était pas un chef-d’œuvre d’architecture,
mais c’était l’un des rares monuments publics à rappeler la mémoire de Villeneuve
et de son unique paroisse, Saint-Thomas. On densifie le territoire, c’est maintenant le
mot d’ordre de la grande ville carburant au progrès !!! Il reste
bien sûr de belles maisons ancestrales sur le Chemin Royal pour rappeler ce que
nous avons été et la rue Philippe-Grenier de l'arrondissement Beauport pour honorer la mémoire de ce
maire qui fut mon grand-père.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire